Orange est-il en train de prendre possession du Web Français ?
21/01/2011 3 commentaires
Orange serait actuellement en phase de négociation pour entrer à hauteur de 30 à 50% dans le capital de Dailymotion, valorisant la société à hauteur de 200 millions d’euros. Après la prise de participation dans Deezer en juillet 2010 (Orange avait acquis 11% des parts), Orange poursuit sa marche en avant dans l’acquisition d’acteurs français du Web si bien que l’on peut se demander s’il s’agit d’une véritable stratégie d’entreprise ou d’un simple opportunisme ?
Orange a toujours affiché sa volonté d’utiliser le Web comme relais de croissance avec plus ou moins de succès. Le portail Orange.fr est l’exemple type du succès d’Orange sur le Web, le site se plaçant dans le top 5 des sites français les plus visités. Mais ce bon résultat est l’arbre qui cache la forêt. En effet, la place d’orange.fr s’explique surtout par la part d’abonnés Orange ADSL qui retrouvent le portail de l’opérateur en page d’accueil par défaut de leur navigateur, et par les autres abonnés ou prospects souhaitant se renseigner sur leur abonnement ou sur les offres. Ainsi, il est difficile de quantifier la véritable audience en propre du site.
Les autres initiatives de la marque auront à l’inverse eu beaucoup moins de succès, on peut citer quelques exemples comme wormee, bubbletop rebaptisé Djinngo, Pikéo ou récemment Vidéo Party. Tous ces sites n’ont pas réussi à trouver leur audience et leur résultat s’explique notamment par les renvois d’audience du portail Orange.fr vers ces sites.
Ainsi, il semblerait qu’Orange se soit résolu à basculer d’un modèle de croissance organique sur le Web à une stratégie de croissance externe, via des prises de participation de grands acteurs français du Web.
Ce mode de développement, bien que coûteux offre l’avantage de bénéficier d’une base d’audience établie, d’une légitimité de marque que le nom Orange ne véhicule pas forcément chez les internautes et de solutions « clé en main » qui permettent d’être fonctionnel très rapidement. En outre la prise de participation et non l’acquisition complète permet de limiter les risques tout en maintenant les équipes en place. Enfin, outre les revenus propres générés par les activités de ces sites, Orange semble vouloir créer des synergies avec ses propres offres. Ainsi Deezer a été intégré aux abonnements des clients mobiles, avec succès puisque plus de 500 000 abonnés y ont souscrit depuis le lancement de l’offre en Août 2010 (source Orange). On peut rappeler également le cas de Cityvox racheté en 2008 et qui est maintenant intégré à la chaîne « En ville » du portail Orange et à la chaîne cinéma sous la marque de sa filliale Cinéfil.
De la même manière, on peut facilement imaginer l’utilisation potentielle de Dailymotion dans l’offre d’Orange sur PC en complément de Vidéo Party mais aussi sur TV en complétant l’offre IPTV de l’opérateur par une consommation de contenus délinéarisés de vidéos courtes (Dailymotion est d’ailleurs déjà intégré au bouquet TV de SFR). Orange va également bénéficié du savoir-faire éditorial de Dailymotion pour la mise en avant de contenu et l’acquisition de contenus de qualité semi-professionel comme les webséries. Enfin, Orange pourra s’appuyer sur les infrastructures techniques déployées par Dailymotion pour délivrer de la vidéo en ligne.
On peut maintenant se demander où s’arrêtera Orange dans cette démarche et quelles pourraient être les prochaines cibles de l’opérateur ? Aujourd’hui, personne ne peut dire quel est le véritable modèle employé par Orange, mais les premiers succès rencontrés peuvent laisser penser à une généralisation du modèle. Néanmoins, les entreprises cibles se font de plus en plus rares et Orange devra certainement se tourner vers des acteurs locaux étrangers pour trouver de nouvelles opportunités. On peut cependant citer quelques exemples français qui pourraient attirer Orange comme Allociné en complément de l’offre cinéma d’Orange Cinéma Séries, des sites de blogging comme Skyrock blog ou over-blog (groupe TF1) pour développer les usages sociaux, des sites de contenus et d’information comme Wikio ou comment ça marche en complément du portail Orange.fr, voire pourquoi pas un acteur du e-commerce comme cdiscount (groupe casino) ou rue du commerce qui permettraient de faire de l’upsell et du cross-sell en vendant des produits high-tech en complément des abonnements (par ex. la vente de TV HD en complément de l’abonnement IPTV).
L’avenir nous dira donc si Orange continue sa politique d’acquisition ou si les cas Deezer et Dailymotion ne sont que de simples opportunités pour Orange…